Poèmes
Poèmes du jour
que dire à ce temps de guerre
saturé d’images qui saignent
ventres à la découpe et têtes
emballées de poussière d’os et de cendres
que dirons-nous dans ce bruit
crachats mitrailles explosions
et pas une parole qui vaille
parfois une larme glisse sur un écran
à la vitre fendue
comme vie dézinguée
laisse voir ses entrailles qui pourriront
que dire à ces visages
non pas visages mais
bouilles de papier mâché
bouches écumant leur haine
pour la rendre bien juteuse
nids de vipères
embrouilles et galimatias
parfois un enfant passe
et ses jambes tricotent
une vie possible
jusqu’au prochain sniper
que dire dans ce temps de l’égarement
tous les jugements derniers
dépendus des musées
libèrent leurs fous
affûtent leurs faux
poussent des cris affreux
et leurs rires tonitruent
parfois un silence suspend la mort
on peut croire à tous les printemps
2 mars 2024
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en apparence le monde va bien
la route monte et descend
au passage des chèvres
le vent joue avec les serviettes
les pierres se prélassent au soleil
du bord de la terrasse le monde
est amical et généreux
la mer cajole ses bleus
dans le creux des montagnes
les oiseaux vont à leurs affaires
en apparence rien ne nous dit
l’envers la brisure la faille
les explosions souterraines
les galaxies en dérade
le chagrin des étoiles
nous nous accrochons ferme
à cette apparence du monde
à la fenêtre où sa plénitude
nous retient de pleurer
quand vient la nuit où tout s’efface
(Un été grec, inédit)
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regarde
toutes ces filles pendues aux grues
leurs chevelures s’étirent en constellations
bien visibles de ceux qui disent
ne pas pouvoir les regarder
ne pas pouvoir
regarder
le corps d’une femme
le vent souffle et disperse
toutes les chevelures les corps
se fondent dans le cosmos
les corps voyagent de galaxie
en galaxie épousent les courbes
de l’infini dansent
sur la corde du vide
leurs mains en balancier
équilibrent le silence
au-dessus des hommes tout en bas
courbés sous les imprécations
leurs doigts infirmes d’impuissants
crispés sur les tables de la loi
et les chevelures
regarde
s’allongent sans limite
enveloppent le monde
de leur résille
15 novembre 2023
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Me revient le chant d’une histoire ancienne
qui toutes ces années a fait son bruit de glace
pour m’éteindre le cœur à cette heure de nuit
Le vent secoue des cendres
la lune s’est voilée
rien ne reste de ce qui fut embrasé
Ainsi nous allons par un chemin de pertes
abandonnant costumes de féérie
contempler d’un œil neuf le miroir de l’être
à JM
12 janvier 2023
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On croit
une maison
que c’est un toit et des fenêtres
c’est des murs aussi
où s’enferment des vies
toute une vie peut-être
à se tourner ailleurs
vers le violet de la mer
derrière des volets
ou le vert des prairies
dans l’épais des murs frais
une maison c’est en carton
dit la chanson
une porte qui bat
premières – dernières fois
la mesure du temps
passage entre les mondes
des vivants et des ombres
c’est du bric-à-brac une maison
de faïence et céramique
pichets brocs et cuvettes
toute une armada
des jours simples
un monde plein et creux
où l’empreinte des morts
ne pèse rien
c’est des forêts inextricables
diluées à l’encre
de carnets roides et mangés
des comptes fantastiques
égrenés en colonnes qui s’égarent
dans la mémoire lointaine
une maison ça vous réveille
la vie qui n’en finit pas
d’user sa parole
sur la pierre du seuil
A la Victorine- Pour Claude et Charlotte
17 août 2022
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Penchée par la fenêtre de l’ordinateur
vision d’un monde en vrac
soulevé par les déflagrations
jeté hors
aux fossés de l’histoire
ici une libellule lisse ma mémoire
fait de l’air une danse
une transparence sourde à la peur
se risquer hors de la bulle
pour voir encore
un peu saisir de l’horreur
et comprendre que des hommes
broient le malheur
comme on moud le café
– question d’intensité
la matin se cherche entre
musique et cris
28 février 2022
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Bleu quand mélange
l’outremer
ciel et mer
en franchissement d’horizon
dépassement de ligne
avec à-plats terrestres
en façon d’îles
dans la bascule du soleil
au partage des eaux
du jour et de la nuit
virant au cobalt
9 janvier 2022
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En lisant la Comédie
Conduits par le poète
aux jambes de soldat de Salamine
nous entrons ici
tout pleins de l’espérance
Au tamis de sa parole
les chemins scabreux
se séparent et s’ordonnent
en une claire harmonie
Midi équilibre les ombres
dissipe les reflets
depuis Enfer vers Paradis
La forêt est un jardin
enclos loin du bruit
que font les âmes du siècle
in memoriam Kolja Mičevič
Sète, 24 juillet 2020
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Mes amis me pressent d’écrire
je ne serai pas ce vautour
qui arrache des lambeaux d’un air confiné
savent-ils seulement
les mots que je trace
cailloux sur le chemin
et si je me retourne
des paysages se déploient
secouent leurs ombres
prennent le vent
mais s’il n’y a plus de chemin
« je m’en irai de la fête… »
ces vers me hantent
qui disent assez la beauté
du monde sans nous
12 novembre 2020
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Exhibés dans la cour
Des papyrus ruminent
leur ciel exotique
les mouettes crient
une langue barbare
des ramiers languissent
eux frémissent au passage
de nouvelles anciennes
quand pharaons au pschent souverain…
Sète, 23 juillet 2020
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